Séance Glass House. Mardi 12 janvier 2009, 18h, Auditorium de l'Inha


"Dans son journal de travail, Eisenstein colla une image de la tour de verre de Frank Lloyd Wright tirée du New York Magazine daté de juin 1930 et écrivit : "C'est un gratte-ciel en verre, je l'ai inventé à Berlin"
Oksana Bulgakowa, Eisenstein, The Glass House and the Spherical Book, in Rouge (2005)


Glass House - En mars 1926, lors d'un voyage à Berlin pour la première de son film Le Cuirassé Potemkine, Sergueï Eisenstein découvre l'architecture de verre. Il commence dès lors à travailler au projet intitulé "Glass House" conçu en réaction aux bâtiments des architectes Bruno Taut et Mies van der Rohe autant qu'en réponse à Métropolis, le film que Fritz Lang prépare à cette époque et qu'Eisenstein rencontre à cette même occasion. Glass House fait partie des projets "impossibles" d'Eisenstein qui réfléchit par ailleurs à une adaptation du Capital de Marx (dans le style de James Joyce) ou encore travaille à l'écriture de son fameux "livre sphérique". Glass House n'est donc pas (seulement) un film, c'est un véritable objet théorique et une chambre de pensée où se réfléchit une totalité sociale et historique, au coeur de laquelle se trouve le cinéma. Partant des renversements d'angles de prise de vue que doit autoriser l'utilisation du verre, c'est la position du spectateur et donc celle du sujet moderne qui sont interrogées dans une perspective chklovskienne de défamiliarisation du point de vue: "Au départ, le verre comme motivation de points de vue inhabituels", écrit-il. Il s'agit pour Eisenstein, accompagnant en pensée les contradictions de l'architecture moderne, de s'installer à l'endroit de bascule d'un projet d'émancipation en miroir de l'aliénation, en "imagin(ant) une série de situations paradoxales de nature satirique destinées à démonter la logique du monde capitaliste vouant les hommes à l'isolement et à la détresse dans le même temps où se développe une société de masse qui appelle la mise en commun et la solidarité - qu'elle interdit" (François Albera, Introduction à Glass House, Paris, éd. Presses du Réel, 2009, p. 7). "Du projet de film au film comme projet", entre utopie et anti-utopie, dans les notes de travail d'Eisenstein et par la multiplication des points de vue, c'est effectivement quelque chose comme l'histoire de la modernité qui "en volume" se laisse saisir dans la complexité de son projet.

Séance présentée par Ada Ackerman.

Films de Gordon Matta-Clark, Hannah Wilke, Charlie Chaplin, Mark Lewis, archives Saint-Gobain.

Textes, entretiens et contributions de Sven-Olov Wallenstein, Maria Stavrinaki, Oksana Bulgakowa et Gilles Amalvi.

Institut national d’histoire de l’art
Auditorium, Galerie Colbert
2, rue Vivienne 75002 Paris
6, rue des Petits Champs 75002 PARIS