Samedi 26 avril à 18h30 au Bétonsalon, séance Clemens von Wedemeyer

Le Silo vous invite à découvrir deux films de l'artiste allemand Clemens von Wedemeyer:

Big Business est un remake du film éponyme de Laurel et Hardy (1929), numéro burlesque de vente d’arbres de Noël au porte à porte. L’affaire tourne mal au point qu’ils mettent à sac la maison d’un consommateur récalcitrant, lui-même entreprenant de détruire la voiture d’Ollie. Le film a été tourné dans le centre de détention de Waldheim, en ex-Allemagne de l’Est, institution dans laquelle les prisonniers occupent leur temps à construire puis à détruire des maquettes de maisons.

The Making of Big Business. Le making-of du film révèle le contexte de production du film, à la prison de Waldheim, la plus vieille institution pénitentiaire d’Allemagne. Interviews des prisonniers et du directeur de la prison reconstruisent son histoire et en décrivent les affaires courantes.

Clemens von Wedemeyer est né à Göttingen, en Allemagne, en 1974. Il vit et travaille à Berlin et Leipzig. Sa première exposition personnelle à Paris s’est tenue à la Galerie Jocelyn Wolff, en 2003, sous le titre "Cinéma divisible".

Séance présentée par Christophe Catsaros (critique d'art).

"Le film de Clemens Von Wedemeyer nous semble étrangement familier : deux vendeurs de sapins s’acharnent sur la maison et le jardin d’un acheteur qui refuse leur marchandise. Progressivement, ils la démolissent, tandis que ce dernier détruit leur voiture. Big Business reprend l’intrigue ainsi que le titre d’un film de Laurel et Hardy de 1929. Cette information n’éclaire pourtant pas l’étrangeté du remake.

Il faut voir le second film, sorte de making of du premier, pour élucider l’apparence insolite des acteurs tatoués et l’aspect irréel de la maison détruite. Ces acteurs sont en fait des détenus, et le film a été réalisé au sein de la prison de Waldheim, en Allemagne. Tout en démystifiant le premier film, ce documentaire développe une authentique réflexion autour de la réinsertion professionnelle en milieu carcéral. On apprend ainsi qu’une des activités proposées aux détenus consiste à construire des modèles de cellules afin de tester de nouveaux matériaux. Ces détenus passent leur temps construire pour démolir l’outil de leur détention : la cellule. Le choix de la fiction de départ acquiert un nouveau sens : le caractère dérisoire de l’épisode des vendeurs trouve une analogie dans le quotidien de ces hommes. Sous cet angle Big Business est une dénonciation de l’absurdité de l’univers carcéral.Elle stigmatise l’inutilité de ce qui leur est proposé en terme d’occupation. Ces deux films constituent un tandem où fiction et réalité se télescopent. En tant qu’acteurs d’une fiction, ces détenus miment ce qui n’est autre que leur activité quotidienne : démolir. En tant que détenus il leur est demandé de perpétrer au quotidien un acte symbolique majeur de l’imaginaire carcéral : casser le mur de leur cellule."

Christophe Catsaros